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Thomas Deroche : “Les chantiers dans le domaine de la santé environnementale sont encore nombreux”

Dans une tribune pour Acteurs publics, le directeur de l’agence régionale de santé de Normandie insiste sur le rôle majeur que jouent les ARS “pour accompagner et porter des actions, aux côtés des principaux acteurs du territoire”.

L’environnement est un déterminant majeur de santé et constitue une préoccupation croissante des Français. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que les facteurs environnementaux sont responsables de 23 % des décès, de 25 % des pathologies chroniques dans le monde et de 14 % des pathologies dans les pays développés. De même, Santé publique France estime que 40 000 décès par an pourraient être évités en France si la concentration moyenne annuelle de particules fines (PM2,5) ne dépassait pas la valeur guide de l’OMS fixée à 5 microgrammes par mètre cube. Enfin, 4 cancers sur 10 en France pourraient être évités par des actions sur les modes de vie ainsi que par une réduction de l’exposition aux facteurs environnementaux : tabac, alcool, mauvaise alimentation, infections, manque d’activité physique, pollution de l’air extérieur, etc.

Ainsi, il est désormais bien établi que bénéficier d’un environnement de qualité est une condition indispensable à la santé. La préservation, la protection des ressources essentielles – comme une eau et un air de bonne qualité, une alimentation saine – ainsi que la promotion et le développement d’un environnement et d’un cadre de vie favorables au bien-être des populations sont les bases de la santé publique et constituent la boussole de l’action publique.

Plans d’action régionaux et nationaux

Les communautés santé-environnement travaillent depuis plus de quinze ans à l’échelle de chaque région sur des actions en faveur de la santé et de l’environnement. Dans leurs domaines de compétence, les agences régionales de santé (ARS) jouent un rôle majeur pour accompagner et porter des actions, aux côtés des principaux acteurs du territoire. Cela se traduit par le copilotage par les ARS, avec les préfectures de région et parfois les conseils régionaux, du plan régional santé-environnement (PRSE), déclinaison du plan national santé-environnement (PNSE), qui vise à limiter l’impact de l’environnement sur la santé dans les territoires. 

Depuis 2004, les 3 précédents plans nationaux et régionaux ont permis des avancées notables pour réduire l’impact de notre environnement sur notre santé à toutes les échelles du territoire : la réduction de 50 à 80 % des émissions atmosphériques de substances dangereuses par l’industrie ; la mise en place d’une surveillance obligatoire de la qualité de l’air intérieur dans les crèches et écoles ; le déploiement de 7 000 référents locaux pour mettre en place des actions de prévention et de destruction de l’ambroisie [plante envahissante très allergisante, ndlr] sur l’ensemble du territoire ; le soutien de plus de 750 projets de recherche en santé-environnement.

À titre d’exemple, 68 actions ont été définies dans le cadre du troisième plan régional santé-environnement normand, dont près des trois quarts sont complétées. Elles ont notamment concerné la protection de la ressource en eau, avec l’élaboration d’une stratégie d’action interservices et l’engagement d’une trentaine de démarches du Plan de gestion de la sécurité sanitaire des eaux (PGSSE) avec les agences de l’eau et l’ARS, la mise en place d’un dispositif de repérage et de lutte contre les espèces nuisibles à la santé au plus près des besoins des collectivités avec l’appui de Fredon [réseau indépendant d’experts “au service de la santé du végétal, de l’environnement et des hommes”, ndlr], ou encore le renforcement de la politique de lutte contre l’habitat indigne en lien avec les parquets. 

Les leviers et outils existent. Il faut pouvoir mieux les partager.

Une action spécifique a également été engagée afin de réduire les expositions aux polluants de l’environnement intérieur et au radon dans les bâtiments via le déploiement d’actions de sensibilisation des acteurs propriétaires et des gestionnaires d’établissements accueillant des publics vulnérables et le soutien aux actions d’éducation sur la santé environnement en milieu scolaire. Enfin, l’appui aux collectivités pour mettre en place des projets concrets d’environnements favorables à la santé et des démarches d’évaluation d’impact en santé s’est traduit par le soutien de 25 projets pour un montant de près de 4,5 millions d’euros. 

Permettre à chacun d’être acteur de son environnement

L’ambition portée par le quatrième plan national santé-environnement est de permettre à chacun d’être acteur de son environnement et de sa santé, c’est-à-dire de mieux comprendre et mieux connaître les risques auxquels il est exposé afin de mieux agir au quotidien, par des actions concrètes et immédiates, pour réduire son exposition et ses impacts sur l’environnement. Fondé sur l’approche “Un monde, une santé”, il doit permettre à chacun, citoyen, élu, professionnel, chercheur, d’agir pour un environnement favorable à notre santé.

Les leviers et outils existent. Il faut pouvoir mieux les partager, faire connaître ce qui fonctionne et se saisir des possibilités d’agir en prévention et promotion d’un environnement et d’un cadre bénéfique à la santé, notamment dans les politiques d’aménagement et d’urbanisme, en lien avec les collectivités locales. 

La crise sanitaire liée au Covid-19 a mis en avant de nouveaux besoins et enjeux qui sont repris dans le plan national et doivent être déclinés en région. C’est notamment le cas des systèmes de surveillance, de veille et d’alerte en matière de santé animale (santé animale, faune sauvage et espèces envahissantes), ainsi que la surveillance et l’observation de la santé des écosystèmes, dans une approche “une seule santé”. Cet enjeu est particulièrement important dans un contexte de changement climatique, de croissance démographique, d’évolution des échanges mondiaux, sources de pressions et de déséquilibres de plus en plus forts sur l’environnement, les écosystèmes et la faune sauvage.

Agir en faveur de la santé et de l’environnement passe également par les professionnels de santé, afin de combler un besoin d’informations, identifié par de plus en plus de professionnels, et un manque dans les formations initiales et continues. C’est l’une des actions du plan national qui sera déclinée dans toutes les régions. 

Accompagner les structures dans leur modernisation

Parmi les enjeux dans les territoires, il est évidemment indispensable de mentionner les effets du changement climatique. L’été 2022 nous a montré à quel point il faut renforcer collectivement notre action pour préserver et protéger les ressources, et notamment la ressource en eau, en termes de quantité mais également de qualité. Cette action est partagée par l’ensemble des services de l’État, les acteurs de l’eau et du territoire. 

Le recrutement de conseillers en transition énergétique et écologique dans les territoires offre aux établissements sanitaires un appui méthodologique et financier fondamental.

L’action en faveur de la transition écologique se traduit également par la promotion du développement durable auprès des établissements sanitaires et médico-sociaux, priorité stratégique de l’ARS Normandie développée dans le cadre d’un partenariat avec l’Ademe [l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, ndlr], qui se poursuivra elle aussi dans le futur plan régional de santé. À ce titre, les investissements prévus par le “Ségur de la santé” à destination des établissements constitue une opportunité majeure pour accompagner les structures dans leur modernisation, tournée vers la transition écologique et l’efficacité énergétique.

Le recrutement de conseillers en transition énergétique et écologique dans les territoires, financé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et la direction générale de l’offre de soins, et dont la coordination nationale est assurée par l’Anap [l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, ndlr], offre aux établissements un appui méthodologique et financier fondamental sur diverses missions : réaliser des audits énergétiques, initier des plans d’action de réduction de la consommation énergétique et d’amélioration de la qualité de l’air, développer des outils et des recommandations pour limiter les pollutions, ou encore promouvoir les écogestes et valoriser l’action des établissements.

Ainsi, si beaucoup a déjà été fait en matière de santé environnementale, les chantiers dans ce domaine sont encore nombreux. Leur mise en œuvre demandera de poursuivre la mobilisation partenariale de l’ensemble des acteurs initiée depuis plusieurs années, afin d’assurer concrètement la traduction de la transition écologique au cœur des territoires.

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Club des acteurs publics

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