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La responsabilité pénale des décideurs : l'urgence d'un débat politique

La crise sanitaire vient rappeler l’urgence d’un débat politique et d’une réforme de la responsabilité pénale des décideurs publics. Il s’agit de tracer un chemin susceptible d’éviter deux écueils : l’impunité et, à l’inverse, la paralysie de l’action publique. 

 

Un serpent de mer. C’est le sujet qui ne cesse de monter. A mi-chemin entre philosophie, éthique, droit et politique. Quelle responsabilité pour les acteurs publics ? Depuis le début de la crise sanitaire, la mise en cause de plusieurs des ministres et hauts fonctionnaires fait débat. Le 10 septembre, l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn a été mise en examen pour “mise en danger de la vie d’autrui”. D’autres mises en examen pourraient suivre.  

A ce stade, le débat parait mal emmanché et fait ressortir une situation assez paradoxale. Au sommet de l’État, celui qui détient le plus de pouvoir (le Président de la République) est irresponsable pénalement pour les actes commis durant son commis. Ce principe a été confirmé dans les années 2000. Plus bas en revanche, la responsabilité pénale prévaut.  

La mise en cause de responsables politiques divise profondément. Avec d’un côté ceux qui refusent toute impunité pénale et qui gardent en tête le sort des victimes et de leurs familles auxquelles il serait étonnant de refuser toute recherche de responsabilité. A l’opposé, d’autres voies s’offusquent de l’apparition d’un gouvernement des juges qui entendrait refaire le match a posteriori et devrait procéder à un partage des responsabilités entre les différentes générations de décideurs ayant influé sur le dossier.  

Dans son étude annuelle consacrée aux états d’urgence, le Conseil d’État a tenté de résumer le problème : l’identification d’une responsabilité pénale procédant par essence d’une analyse rétrospective peut-elle être concomitante à une action publique de crise déjà bouleversée par une situation sanitaire incertaine ?  

Le Palais Royal a estimé que la responsabilité pénale des décideurs ne devrait pouvoir être mise en cause en raison de leur inaction que si le choix de ne pas agir leur est directement et personnellement imputable. “La menace de poursuites pénales est un facteur susceptible d’obérer l’action des responsables politiques et administratifs”, souligne le Conseil d’État en observant que la crainte d’une mise en cause pénale parait avoir “paralysé les moins téméraires” et à tout le moins “nourri une attitude prudentielle aiguë”.  Le recours au droit pénal “est conçu comme une arme qui exprime la détresse ou la réprobation de ceux ne parviennent pas à obtenir les explications qu’ils souhaitent ou à identifier les responsables qu’ils recherchent, a estimé le Conseil d’État. L’action pénale agit souvent, à cet effet, comme palliatif et substitut à l’absence de responsabilité professionnelle, sociale ou politique et les plaintes répondent souvent à un besoin de comprendre et de se faire entendre”. 

A une époque où il est de bon ton de rappeler chaque matin, combien le politique se révèle impuissant face aux attentes du citoyen, la seule manière de sortir de ce débat sur la responsabilité pénale reste encore de l’organiser au plan politique et de l’assumer comme tel. Puis de trancher.  

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Club des acteurs publics

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