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Louis Jacquart (DITP) : “Pourquoi les sciences comportementales peuvent appuyer la transformation”

La direction interministérielle de la transformation publique (DITP) va lancer, le 15 février, une formation baptisée “Travailler autrement”, destinée à accompagner la transformation managériale à l’œuvre dans l’administration en s’appuyant sur les sciences comportementales. Revue de détail avec Louis Jacquart, adjoint à la cheffe de la mission “Innovation publique–innovation managériale et coaching” à la DITP.

Quelle est l’origine du projet “Travailler autrement” ?
Cette formation s’inscrit dans le cadre du déploiement de “Fonction publique +”, le programme d’amélioration continue porté par Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, à l’occasion de son déplacement à l’IRA de Nantes mercredi 1er février, qui avait pour ambition de répondre opérationnellement aux enjeux d’attractivité de la fonction publique. Elle répond à la volonté de développer de nouvelles pratiques pour s’appuyer pleinement sur la force des collectifs de travail. La formation donne ainsi de nombreuses pistes d’action pour mieux travailler en équipe, mais aussi pour mieux travailler soi-même. Nous pensons que ce changement de culture managériale doit être mené de manière collective en s’appuyant sur les agents et les managers, de manière systémique. À la DITP, notre mission est d’accompagner la transformation de l’administration en outillant les agents (qu’ils soient ou non managers) pour mener à bien ces changements. C’est tout l’objet de la formation “Travailler autrement”. Nous avons notamment fait appel aux derniers enseignements des sciences comportementales et du management. Puis nous avons testé et expérimenté cette formation pendant trois mois. Nous l’avons évaluée avant de l’enrichir et de la faire évoluer pour répondre pleinement aux besoins exprimés.

Que peuvent apporter les sciences cognitives et comportementales en matière de management ?
Elles permettent de comprendre les causes racines des difficultés et d’agir ainsi de manière durable sur les comportements. Les sciences cognitives et comportementales aident en effet à mieux comprendre le fonctionnement d’un individu ou d’un groupe en analysant les mécanismes de décision et les biais cognitifs, c’est-à-dire les schémas de pensée qui poussent les individus à porter tel jugement ou à prendre telle décision. Elles permettent ainsi d’analyser et de comprendre en profondeur les postures professionnelles et les modes de travail. Elles permettent aussi d’obtenir un effet durable, car on s’attache aux causes profondes du comportement de l’individu. Si la prise de conscience de tel ou tel biais peut être individuelle, elle doit ensuite être partagée avec le collectif. Nous en sommes convaincus : si une équipe entière se met à s’interroger en même temps et qu’elle est soutenue par le manager, la transformation sera efficace.

Les sciences cognitives et comportementales permettent de comprendre les causes racines des difficultés.

En quoi était-il nécessaire de travailler sur cette thématique ?
La DITP porte une conviction profonde : il faut davantage prendre en compte le facteur humain pour concevoir et conduire l’action publique ainsi que mener à bien les transformations nécessaires. Il est donc indispensable de travailler à partir de ce qui se passe sur le terrain aux côtés des agents. Cette formation fait suite à nos travaux sur le télétravail en 2020, sur les nouvelles pratiques de travail et leur impact sur le collectif, dans le contexte du confinement puis de la généralisation du télétravail. Cela a poussé les équipes à s’interroger sur la manière de bien fonctionner ensemble, et à rechercher des solutions aux difficultés rencontrées.  

À qui cette formation s’adresse-t-elle ?
Elle est destinée à tous les agents mais surtout aux collectifs de travail. Il s’agit en effet de travailler sur une série de compétences professionnelles qu’un collectif doit maîtriser pour bien fonctionner. Nous avons aussi souhaité que cette formation puisse être suivie n’importe où, n’importe quand, avec des modules en ligne courts, adaptés aux contraintes des agents. Le système d’e-learning se prête bien à ce sujet : tout le monde n’a pas le même temps à consacrer à cette formation ni les mêmes besoins.

De quoi le parcours de formation se compose-t-il ?
Le message clé est de sensibiliser, de faire prendre conscience à chacun de ses bonnes et mauvaises habitudes ou de mauvais comportements qui peuvent partir d’une bonne intention. La formation comporte un autodiagnostic qui permet à chaque agent d’identifier ses points forts et ses points faibles. Elle se décline en 10 compétences clés à travers des modules pratiques de 30 minutes : mieux gérer son temps, mieux comprendre l’autre, stimuler l’engagement, comprendre les effets de sa posture sur son équipe, etc. Toute une partie, consacrée à la relation aux autres et aux relations interpersonnelles, est plus particulièrement destinée aux managers. Il s’agit de comprendre et de prendre en compte ses propres biais dans son rapport aux autres et dans sa prise de décision.

La transformation ne va pas se faire du jour au lendemain, elle doit se nourrir de petits changements.

Les modules comportent aussi une partie pratique…
Chaque module comprend des actions à tester au quotidien. La transformation ne va pas se faire du jour au lendemain, elle doit se nourrir de petits changements qui, additionnés les uns aux autres et réalisés dans un cadre collectif, permettent de modifier les comportements en profondeur.

Comment va-t-elle être déployée ?
La formation “Travailler autrement” va être déployée à partir du 15 février sur la plate-forme Mentor pour les agents et sur le site Web de la DITP pour les responsables “RH et formation” n’ayant pas accès à Mentor. Mais nous l’avons déjà testée à grande échelle auprès de 1 000 agents en administrations centrales, en services déconcentrés et au sein d’opérateurs. Il est ressorti de cette phase d’expérimentation que 80 % des participants ont perçu un impact positif sur leur compréhension des biais personnels et, pour 75 % des managers, un effet positif sur leur posture d’encadrant. Autre retour important : 80 à 90 % des agents disent mettre en place les pratiques recommandées. Ces premiers retours sont très encourageants.

Propos recueillis par Marie Malaterre

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