LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

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Pour répondre aux fortes attentes d’une société en mutation, pour assurer les conditions d’une croissance durable dans un environnement très concurrentiel, pour défendre et adapter un modèle social, socle du pacte républicain et possible rempart contre les conséquences de la crise financière mondiale, les organisations publiques se doivent d’être performantes. Les équipes Secteur Public d'EY ont pour ambition d’accompagner les administrations vers davantage d’efficacité, de performance et de transparence.

6 min

Sondage : les agents publics doivent monter en compétences sur la relation aux usagers

Deux Français sur 3 estiment que les compétences des agents publics ne sont pas, aujourd’hui, en adéquation avec les attentes des usagers, selon l’enquête Acteurs publics/EY pour l’Observatoire des politiques publiques réalisée par l’Ifop. Logiquement, 7 sur 10 citent la relation avec les usagers comme compétence à faire évoluer en priorité.

Le sujet a beau figurer en haut de la pile sur le bureau des managers du secteur public, la réponse des administrations aux attentes des usagers est encore négativement perçue par les Français, selon l’enquête Acteurs publics/EY pour l’Observatoire des politiques publiques réalisée par l’Ifop [lire la tribune de Guéric Jacquet, associé EY Consulting “secteur public”, et Arnaud Lizé, directeur associé EY Consulting “secteur public”].

L’institut a sondé l’opinion publique au sujet des compétences et des formations nécessaires aux agents publics. La perception est rude : les deux tiers (67 %) des Français estiment actuellement que les compétences des agents publics ne sont pas en phase avec les attentes des usagers. Mais si le manque de compétences “adaptées” de la part des agents publics est une vision partagée par la majorité des Français, nous constatons toutefois que les répondants salariés dans le secteur public atténuent significativement ce constat (57 %, contre 70 % parmi les salariés du secteur privé).

Les femmes sont globalement plus sévères que les hommes, avec une opinion négative à 72 % parmi elles. On observe également un net clivage politique puisqu’ à peine 23 % des électeurs de Marine Le Pen trouvent les compétences des agents adéquates, contre 48 % des électeurs d’Emmanuel Macron en 2022.

La transition écologique en deuxième position chez les moins de 35 ans

Les compétences spécifiquement attendues par les Français chez les agents publics ont logiquement surtout trait à la relation avec les usagers (70 %, dont 87 % parmi les personnes âgées de plus de 65 ans), largement devant des compétences plus “invisibles” aux yeux des particuliers, comme la transformation du secteur public (41 %), la connaissance du secteur privé (35 %), la maîtrise du numérique (34 %, dont 44 % parmi les cadres et professions intellectuelles supérieures). À noter que les compétences sur la transition écologique, citées par 30 % des sondés, arrivent juste derrière la relation avec les usagers chez les moins de 35 ans (45 % des citations).

Les objectifs de ces formations, selon les Français, seraient principalement d’ajuster les compétences des agents publics à l’exercice de leurs missions (63 % des citations). Plus marginalement, les personnes interrogées estiment que ces formations serviraient aussi à préparer l’évolution professionnelle des agents dans leur administration (19 %), mais également à préparer leur conversion vers une autre administration (8 %) ou même leur passage dans le privé (10 %). 

Enfin, lorsque les Français se mettent à la place d’un agent public, ils sont avant tout demandeurs de formations pour mieux servir les usagers et gérer la relation avec ceux-ci (46 %), devant l’amélioration des compétences techniques liées au métier (38 %), les connaissances du secteur public et de ses règles (38 %) ou du droit public (37 %), ainsi que le fait d’acquérir des compétences techniques en vue d’un changement de poste (29 %). Le classement n’est pas le même chez les répondants travaillant dans le secteur public, où 38 % citent la connaissance du droit public, décrivant ainsi la complexité accrue de leur mission, à quasi-égalité (39 %) avec les compétences techniques liées au métier.

Frédéric Dabi, directeur général de l’Ifop

L’enquête Acteurs publics/EY pour l’Observatoire des politiques publiques réalisée par l’Ifop a été menée par questionnaire auto-administré en ligne du 13 au 14 février 2024 auprès d’un échantillon de 1 011 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de famille) après stratification par régions et catégories d’agglomération.

ANALYSE

Renouveler la formation des agents publics ?

Par Guéric Jacquet, associé EY Consulting “secteur public”,
et Arnaud Lizé, directeur associé EY Consulting “secteur public”

Une école de formation appliquée structure une profession : elle transmet les fondamentaux des métiers exercés, elle structure les pratiques professionnelles et véhicule une éthique et un esprit de corps au sein de ses membres, leur permettant de faire face lors des épreuves individuelles et collectives auxquelles ils seront confrontés au cours de leur vie professionnelle.

C’est pourquoi ces écoles sont le plus souvent intégrées et gérées par les professionnels eux-mêmes (douanes, police, protection judiciaire de la jeunesse, défense…), en parallèle des écoles d’administration générale (IRA, INSP, CNFPT, ENSP…). En formant des générations d’agents publics pendant des décennies, elles ont assuré la continuité du service public, rendant dès lors très sensibles toute évolution de leur modèle et toute réforme de leur statut.

Cursus personnalisés

Ce renouvellement des enseignements, des modalités pédagogiques, des technologies utilisées et de l’esprit des formations est pourtant particulièrement nécessaire à l’heure où le paysage de la formation a beaucoup évolué. En effet, les systèmes de formation professionnalisante du secteur privé ont accompli en quinze ans une profonde révolution qui ne s’est qu’en partie retranscrite dans le secteur public. 

D’abord, les cursus se sont internationalisés, favorisant les échanges universitaires, la multiplicité des campus et l’enseignement en plusieurs langues. L’objectif est à la fois de permettre aux professionnels de pouvoir interagir facilement dans un environnement non exclusivement français, mais aussi d’ouvrir l’esprit des étudiants sur d’autres expériences. Cette évolution touche aussi les enseignants, qui sont eux-mêmes plus internationaux. 
Cursus personnalisés, nouveaux contenus…

Ensuite, les cursus se sont fortement personnalisés, s’adaptant au rythme et aux envies des étudiants, à l’échelle des cours sélectionnés chaque semestre, se renforçant par le développement des doubles diplômes. Devenus fréquents, ceux-ci permettent de croiser les compétences et de former à de nouvelles spécialités, par exemple data et marketing ou finance, via des partenariats entre écoles de management et d’ingénieurs. 

Le contenu des cours lui-même évolue à un rythme effréné, intégrant rapidement de nouveaux modules dans les formations, liés à l’intelligence artificielle ou la transition écologique et à leurs impacts sur les métiers. 

Enfin, le poids de la formation continue dans les écoles privées a fortement augmenté, se traduisant par le développement de masters spécialisés ou de modules plus courts, sur quelques semaines ou quelques mois, pour répondre à la demande des salariés voulant se reformer ou évoluer professionnellement. Cette offre renouvelée a été aussi rendue possible par le développement du “mix” présentiel-distanciel, devenu un standard dans l’ensemble des formations. Il a nécessité des investissements significatifs dans le numérique éducatif. 

Dans un contexte de transformation des services publics, les enjeux de la formation professionnelle des agents publics apparaissent élevés afin de garantir à ceux-ci de détenir les compétences requises pour l’exercice de leur métier demain et de leur permettre d’évoluer professionnellement avec succès. Cette acuité est d’autant plus marquée que les dépenses annuelles des employeurs publics en matière de formation sont importantes : près de 3 milliards d’euros pour l’État en 20211 et 286,4 millions pour les collectivités territoriales en 20222.

Face à ces enjeux, 5 pistes majeures d’évolution peuvent être mises en exergue.

Une première piste consiste à développer davantage des pôles de recherche communs à différentes écoles pour redynamiser la recherche concernant le management public, mais aussi concernant les politiques publiques prioritaires, par exemple en matière de sécurité intérieure, de répression des fraudes ou de finances publiques. Une telle recherche appliquée peut ainsi permettre d’irriguer les formations et de conforter leur qualité, grâce à l’apport de connaissances “à l’état de l’art”.

Une deuxième piste d’évolution consiste à renforcer le rôle des écoles de formation en matière d’appui à la reconversion des agents publics pour garantir à ceux-ci le droit à une deuxième carrière. Ce renforcement suppose, en particulier, la création de nouveaux cursus courts dédiés aux réorientations, mais aussi la simplification des transferts, par exemple à travers le maintien de la rémunération durant la phase de reconversion, des cursus accélérés et adaptés à des personnes expérimentées en phase de reconversion, et de rénover les épreuves des concours internes afin de valoriser au maximum les compétences acquises et pas seulement les aptitudes académiques.

Une troisième piste consiste à mutualiser davantage encore – notamment en interministériel – les dispositifs de formation dite transversale (management, communication, langues étrangères, préparation à certains examens et concours…), à la fois pour maximiser les taux de remplissage des stages et contribuer à la maîtrise de la dépense publique (investissements numériques, immobilier…).

Sur le même registre, une quatrième piste d’évolution réside dans la mutualisation accrue des fonctions support (RH, informatique, finances budget, juridique) des structures de formation publiques, a minima entre les écoles d’un même ministère, voire en interministériel, pour effectuer des économies d’échelle et obtenir ainsi des gains de productivité.

Enfin, une cinquième piste consiste à ouvrir davantage les formations des agents publics à des organismes de formation privés et à développer les synergies public-privé, selon des modalités variées : mise en place d’intervenants communs, de diplômes communs, internationalisation, modalités d’enseignement, en particulier dans des domaines comme le numérique – et en particulier l’intelligence artificielle – ou la transition écologique. Ceci permettrait notamment d’intégrer plus rapidement les évolutions fondamentales, comme dans le cas de l’IA générative, et de bénéficier des dernières pratiques pédagogiques comme le recours à la réalité virtuelle, qui permet de déployer des formations plus interactives et immersives.

[1] Source : Annexe au projet de loi de finances pour 2024 “Formation professionnelle”, p. 87.
[2] Source : Annexe au projet de loi de finances pour 2024 “Formation professionnelle”, p. 90.

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