Partager

3 min
3 min

Avec son livre blanc sur la sécurité, l’Intérieur compte franchir le “mur technologique”

Reconnaissance faciale, intelligence artificielle, drones… Le livre blanc de la sécurité intérieure, publié la semaine dernière en parallèle de l’examen de la proposition de loi “Sécurité globale”, témoigne du saut technologique que la Place Beauvau entend réaliser pour surmonter les défis contemporains. 
 

Franchir le “mur technologique” : c’est en résumé l’ambition affichée par le ministère de l’Intérieur dans son livre blanc sur la sécurité intérieure. Initié il y a tout juste un an par Christophe Castaner, le prédécesseur de Gérald Darmanin place Beauvau, notamment à la suite de la crise des “gilets jaunes”, ce travail devait redéfinir les priorités et les modalités d’actions afférentes. Un an plus tard, ce document de 332 pages présage en particulier un bond en avant dans l’utilisation des technologies. Dont certaines se retrouvent déjà dans la proposition de loi “Sécurité globale”, examinée en ce moment à l’Assemblée nationale.

Son article 22, relatif aux “caméras aéroportées”, formalise l’usage des drones à des fins de surveillance par les forces de sécurité, mais aussi par les militaires et secouristes. Or, comme le dénoncent ses opposants, le texte n’étant pas à l’initiative du gouvernement, aucune étude d’impact n’a été réalisée par celui-ci pour évaluer les effets potentiels de cette loi.

Expérimenter la reconnaissance faciale… et autres

Sécurité oblige, le sujet de la reconnaissance faciale ne pouvait être évité. Le livre blanc propose à ce titre “d’expérimenter la reconnaissance faciale dans les espaces publics, afin de maîtriser techniquement, opérationnellement et juridiquement cette technologie à des fins de protection des Français”. Cette proposition avait déjà été soumise et soutenue par le secrétaire d’État à la Transition numérique, Cédric O, après la polémique autour de l’application mobile Alicem, qui reposait sur un mécanisme de reconnaissance faciale pour permettre aux citoyens de s’identifier dans le monde numérique. La Place Beauvau se fait l’écho de ce besoin d’expérimentation, pour être en mesure de “quantifier les difficultés de déploiement à l’échelle de grands réseaux, en termes de charge de calcul, de coût des matériels de déploiement, d’évaluation des différentes catégories d’algorithmes” et des différents capteurs.

À côté de l’image, déjà au cœur des missions de sécurité à travers les dispositifs de vidéosurveillance, le ministère de l’Intérieur entend défricher d’autres terrains de la biométrie. Le ministère souhaiterait ainsi adopter une approche “multibiométrique”, en développant et expérimentant des capteurs d’odeurs ou de la voix. 

Le développement des technologies d’intelligence artificielle constitue à ce titre un axe de développement important du ministère, que ce soit pour analyser les données biométriques ainsi collectées (images, sons, odeurs) ou pour faciliter le travail quotidien des agents, avec des outils de commande vocale et de compte-rendu. À l’instar de Bercy pour la détection des fraudes fiscales, l’Intérieur entend aussi utiliser la puissance de l’analyse des données en libre accès sur Internet, et en particulier les réseaux sociaux pour repérer d’éventuels “signaux faibles” d’actes malveillants. La Place Beauvau se donne en outre pour mission de structurer sa politique de la donnée, pour mieux identifier les données produites et détenues et pouvoir en tirer tous les bénéfices. 

Innovation “ouverte”

Soucieux de s’emparer des nouvelles technologies et du potentiel offert par le numérique, le ministère de l’Intérieur entend également amplifier sa démarche d’innovation, aujourd’hui incarnée par différents dispositifs éclatés dans ses différentes directions. Dernières initiatives en date, la transformation de la direction des systèmes d’information (DSI) en direction du numérique (DNUM) et la création d’un “laboratoire d’innovation”, déjà à l’origine de plusieurs services, et notamment de l’attestation de sortie dématérialisée dans le cadre du confinement. “Dans un monde en évolution rapide, qui voit l’État confronté à des forces criminelles protéiformes et contesté par des acteurs numériques privés internationaux, la capacité de recherche et d’innovation des forces de l’ordre et de secours est fondamentale”, affirme le ministère. 

Celui-ci estime qu’il gagnerait à donner plus de “lisibilité et une structuration plus claire” de son écosystème de recherche. “La liberté donnée aux directions et services pour prendre des initiatives de R & D au plus proche de leurs besoins a permis au ministère de l’Intérieur de bénéficier d’une dynamique d’innovation”, est-il indiqué dans le livre blanc, mais “cette structuration présente cependant l’inconvénient d’un cloisonnement excessif préjudiciable”, malgré la création d’une entité telle que le service des technologies et des systèmes d’information de la sécurité intérieure, le ST(SI)², conjoint à la gendarmerie et à la police nationales.

Il est donc proposé de mettre en place “un dispositif d’animation de communauté léger” sous la forme d’un “comité de recherche et d’innovation de sécurité intérieure (Crisi)”, qui serait composé de policiers, de gendarmes et de sapeurs-pompiers et “appuyé par le regard de personnalités extérieures”. Une manière de remettre de la cohérence dans les projets innovants du ministère, tout en laissant davantage de place à la recherche partenariale, en particulier avec le monde universitaire.

Partager cet article

Club des acteurs publics

Votre navigateur est désuet!

Mettez à jour votre navigateur pour afficher correctement ce site Web. Mettre à jour maintenant

×