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La suppression du corps diplomatique attaquée en justice

Après la grève historique du 2 juin dernier, 3 syndicats du Quai d’Orsay viennent de déposer un recours contre le décret d’avril dernier actant la mise en extinction des corps diplomatiques. Une action en justice qui intervient tout juste avant le lancement des États généraux de la diplomatie annoncés par Emmanuel Macron.

La réforme du corps diplomatique continue de faire des remous. Après la grève historique du 2 juin dernier, 3 syndicats du Quai d'Orsay ont décidé de déposer un recours devant le Conseil d‘État contre la suppression des corps diplomatiques. Un recours déposé par la CFTC-MAE, l’Asam-Unsa (Association syndicale des agents du ministère des Affaires étrangères) et l’Organisation des secrétaires des affaires étrangères (Osae), qui viennent d'en faire l'annonce.

Le recours en question est dirigé contre le décret du 16 avril dernier, pris en application de l'ordonnance du 2 juin 2021 de réforme de la haute fonction publique et qui était venu préciser les modalités de mise en extinction, à compter du 1er janvier 2023, du corps des conseillers des affaires étrangères et du corps des ministres plénipotentiaires. 

Comme prévu dans ce décret, un corps unique d’“extinction” fusionnant ces deux corps a été créé le 1er juillet dernier. Les membres de ces corps seront ensuite intégrés, sauf droit d'option, dans le nouveau corps interministériel des administrateurs de l’État aux côtés des préfets ou des membres des corps d'inspection, eux aussi mis en extinction. Pour rappel, l'ordonnance du 2 juin 2021 de réforme de l'encadrement supérieur de l’État a été validée par le Conseil d’État en juillet 2022, après que celui-ci a rejeté plusieurs recours déposés par des syndicats et associations de hauts fonctionnaires. 

“Épuisement des tentatives de dialogue”

Ce recours contre le décret “fait suite au passage en force de cette réforme sans dialogue préalable par nos autorités qui ont ignoré nos mains tendues ainsi qu'à l'épuisement de toutes les tentatives de dialogue de nos organisations”, affirment les 3 syndicats dans un communiqué. 

Ces organisations critiquent “plusieurs aspects destructeurs de la dissolution” des corps diplomatiques dans un “ensemble interministériel aux contours flous” : “la négation des métiers et des compétences qu'ils supposent bien différentes des métiers de l'administration publique”, “la disparition de la double vocation à servir en France comme à l'étranger qui caractérisait nos métiers et nos corps et qui sera désormais considérée comme une mobilité classique pour le corps interministériel des administrateurs de l’État”, “le risque d'un exercice excessif du pouvoir discrétionnaire de nomination”... 

Le sujet de la suppression du corps diplomatique ne manquera en tout cas pas d'être évoqué dans le cadre des “États généraux de la diplomatie” annoncés par l'exécutif, qui ne compte toujours pas revenir sur cet aspect de la réforme. Le lancement de cette concertation doit d'ailleurs intervenir dans les prochains jours, comme vient de le préciser la ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, Catherine Colonna, dans un message adressé aux agents du Quai. 

Les États généraux de la diplomatie au travail
d’ici quelques semaines

Ces États généraux, leur explique-t-elle, “seront notre première occasion depuis très longtemps de réfléchir ensemble à l'avenir de notre diplomatie” : “Ils doivent nous permettre d'aborder, de façon ouverte et inclusive, l'évolution de nos missions et métiers diplomatiques et consulaires, dans un monde confronté à des mutations multiples et profondes.” 

Trois groupes de travail vont ainsi se réunir dans les prochaines semaines. Le premier portera sur “lesdéfis de la diplomatie et la définition du métier de diplomate au XXIe siècle dans un monde en profonde mutation”, le deuxième sur “les conditions d'exercice des métiers, le déroulement des carrières, le fonctionnement et les méthodes de travail, la valorisation de l'expertise et des parcours des agents et la préservation d'une compétence de haut niveau au service de notre politique étrangère”. Le troisième groupe de travail, enfin, abordera “le rôle du ministère comme chef de file interministériel de l'action extérieure de l’État et les interactions avec les partenaires hors de la sphère étatique”. 

Restitution des travaux fin 2022-début 2023

À une phase de consultation des agents du Quai d’Orsay, “succédera une phase de restitution, de débat et de synthèse, dès la fin de cette année ou dans les premières semaines de l'année 2023”, précise la ministre dans son message aux agents, où elle annonce également la nomination de l'ambassadeur Jérôme Bonnafont comme rapporteur général des États généraux de la diplomatie. À noter que ce dernier vient de publier un ouvrage intitulé Diplomate, pour quoi faire ? aux éditions Odile Jacob. Surtout, cet ambassadeur est très au fait des sujets touchant aux carrières diplomatiques puisque l'ex-ministre Jean-Yves Le Drian lui avait confié une mission de réflexion et de propositions sur ce thème.

Rendu au premier semestre 2021, son rapport insistait notamment sur la spécificité du métier de diplomate. Jérôme Bonnafont y recommandait également la création d'une école diplomatique et consulaire ou encore la revalorisation des personnels diplomatiques. Des propositions qui avaient nourri beaucoup d'espoirs au sein du Quai d’Orsay. Charge désormais à l'exécutif de ne pas décevoir les agents du ministère.

Les 3 syndicats à l'origine du recours devant le Conseil d’État ne se montrent déjà guère optimistes s'agissant des États généraux de la diplomatie : “Ils pourraient être expédiés sans réelle concertation et ne déboucher sur aucune décision concrète sur nos moyens, nos carrières et l'organisation du ministère.” 

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