Partager

4 min
4 min

Le RN compte toujours revenir sur la suppression des corps préfectoral et diplomatique

En cas d'arrivée au pouvoir, le Rassemblement national exclut de mettre en œuvre un spoils system. Le parti promet aussi de revenir sur la suppression du corps préfectoral et du corps diplomatique. Des propositions qui rejoignent celles avancées par Marine Le Pen lors de ses campagnes présidentielles.

Le Rassemblement national (RN) cherche à rassurer les hauts fonctionnaires. Alors que des interrogations se font jour parmi les hauts commis de l’État sur leur attitude potentielle en cas d’arrivée du RN à Matignon, le parti de Marine Le Pen et Jordan Bardella essaye déjà d’apaiser certaines craintes. 

“On ne fera absolument pas de chasse aux sorcières dans la haute fonction publique”, affirme ainsi l’ancien préfet Christophe Bay, candidat aux législatives dans l’Eure-et-Loir sous les couleurs du RN. Le parti semble donc exclure tout spoils system en cas d'arrivée au pouvoir. Lors des campagnes présidentielles de 2017 et de 2022, Marine Le Pen s'était déjà dite défavorable à cette pratique d'inspiration américaine visant à confirmer ou renouveler les directeurs d'administration notamment en début de mandat. “Il n'a jamais été question de mettre en œuvre un spoils system, il faut arrêter d'effrayer tout le monde avec des sujets qui n'ont jamais été sur la table”, abonde le haut fonctionnaire Pierre Pimpie, qui vient d'être élu député européen sous la bannière du Rassemblement national. 

“Les hauts fonctionnaires sont loyaux au gouvernement, c’est dans leurs gênes”

“Nous ne ferons pas la même bêtise que celle faite par les socialistes et les communistes en 1981, lorsque ceux-ci ont décapité par dogmatisme la haute fonction publique, ajoute Christophe Bay, qui fut le directeur de campagne de Marine Le Pen pour la présidentielle de 2022. Quand Mitterrand a changé les trois quarts des préfets en un an à son arrivée à l’Élysée, cela n'a pas aidé à la mise en œuvre du programme de la gauche, ce fut une erreur capitale qu'on ne fera pas.” “Ce que l'on attend de la fonction publique, c'est ce qu'elle fait au quotidien, c'est sa loyauté. Les hauts fonctionnaires sont loyaux au gouvernement, c'est dans leurs gênes et c'est la force de la haute fonction publique", poursuit Christophe Bay, en affirmant n'avoir “aucune espèce de crainte” sur cette question de confiance de la part des hauts fonctionnaires. 

Toujours prompt à afficher sa volonté de “restaurer l’État”, le RN martèle donc aussi aujourd'hui de nouveau sa volonté de revenir sur la suppression du corps préfectoral comme du corps diplomatique. Deux mesures phares de la réforme de la haute fonction publique d'Emmanuel Macron, actées par décrets en 2022. 

Rétablissement du corps préfectoral 

“Il faut revenir sur cette réforme qui a été mortifère pour ces deux grands corps afin de reprofessionnaliser ces corps, explique Christophe Bay. Emmanuel Macron a voulu faire une haute fonction publique jetable, « Kleenex » et à sa botte. C'est le fait du prince, mais ce n'est pas comme cela que l’État doit fonctionner, on ne devient pas préfet ou ambassadeur par la grâce de Dieu, c'est un métier, ça s'apprend, ce sont des années d'apprentissage.” 

Le haut fonctionnaire Pierre Pimpie renchérit : “Nous sommes attachés à un corps préfectoral et à un corps diplomatique qui privilégient une vraie professionnalisation et qui ne prêtent pas le flanc à des dérives de recrutement.” “Être préfet ou diplomate est un métier en soi”, ajoute le nouveau député européen selon qui, toutefois, “il faudra trouver le juste équilibre entre la logique de corps et la logique de décloisonnement”. 

Ce n'est pas la première fois que le RN évoque son intention de revenir sur la suppression du corps préfectoral et du corps diplomatique. Dans un courrier adressé en mai 2021, Marine Le Pen exprimait ainsi son opposition à la mise en extinction du corps préfectoral. Une opération séduction qu'elle avait ensuite renouvelée durant la campagne présidentielle. La suppression du corps préfectoral “confirme une volonté méthodique de déconstruction d'un édifice administratif autour duquel s'est forgée la nation”, soulignait-elle dans son courrier.

La candidate en profitait alors pour pointer un risque de politisation de la fonction de préfet, conséquence selon elle de la fonctionnalisation annoncée du corps. “Derrière cette politique de table rase administrative, poursuivait Marine Le Pen, pointent le risque d’une politisation tant des recrutements que des nominations au sein de la haute fonction publique et la mise en place non avouée d’une logique de spoils system, très éloignée de notre pratique institutionnelle.”  

Instrumentalisation

La réplique du gouvernement ne s'était pas fait attendre. La ministre de la Fonction publique d’alors, Amélie de Montchalin, avait ainsi dénoncé une instrumentalisation des préfets de la part de la candidate du RN : “Je dénonce fermement la tentative dangereuse, coupable et grossière de manipulation politique de nos hauts fonctionnaires par Marine Le Pen”, avait répliqué la ministre. Sur les réseaux sociaux, Amélie de Montchalin avait aussi critiqué un “classique essai de déstabilisation de la République par l’extrême droite” qui rappelait,selon elle, “de sombres années”.

Les préfets n'ont pas à prendre parti, avait aussi répliqué l'Association du corps préfectoral dans une réponse adressée à Marine Le Pen. “Il est exclu que préfets et sous-préfets prennent part à un débat politique”, soulignait ainsi le préfet et président de l’association, Christophe Mirmand. Une réponse très courte sous forme de mise au point, avec toute la distance qui sied, comme toujours, à la fonction préfectorale. 

Partager cet article

Club des acteurs publics

Votre navigateur est désuet!

Mettez à jour votre navigateur pour afficher correctement ce site Web. Mettre à jour maintenant

×