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Le nouveau régime d’infractions et de sanctions des gestionnaires publics

Acteurs publics s’est procuré le projet d’ordonnance du gouvernement actant le régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et comptables. Un dispositif qui recentre le régime répressif sur les fautes les plus graves, ayant un préjudice financier “significatif”. Le texte précise le champ des infractions et des sanctions.

La Cour des comptes sera compétente en première instance. Une “cour d’appel financière” présidée par le Premier président de la Rue Cambon sera également créée

La réforme du régime de responsabilité des gestionnaires publics se précise. Le gouvernement présentera, le 17 février en Conseil commun de la fonction publique, son projet d’ordonnance relatif à la création d’un régime unifié de responsabilité des ordonnateurs et des comptables publics. Ce projet d’ordonnance, qu’Acteurs publics s‘est procuré, est pris en application de la loi de finances pour 2022, qui avait habilité le gouvernement à légiférer par ordonnance sur le sujet. Son entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2023.

Comme c’était attendu, le projet d’ordonnance fixe notamment le champ des justiciables et les infractions et sanctions prévues dans le cadre du nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics. Désormais, en effet, cette responsabilité ne pourra être engagée que pour les fautes “les plus graves” commises par les gestionnaires publics, à condition que le préjudice financier soit “significatif”. Une régression pour certains, qui redoutent qu’avec le nouveau système, les hypothèses d’engagement de la responsabilité des gestionnaires soient réduites à la portion congrue.

Régression ? 

“C’est une critique infondée, avait réagi le ministre chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, dans nos colonnes en novembre dernier. La réforme vise justement à permettre aux juges de se concentrer sur les fautes graves qui ont entraîné un véritable préjudice financier.” L’occasion pour le ministre de mettre en avant les autres sanctions auxquelles s’exposent les gestionnaires publics, au-delà de celles prononcées par juge financier (sanctions managériales, sanctions pénales…) : “Il n’y a donc pas de régression, mais une véritable responsabilisation”, avait-il insisté. 

Comme prévu, le nouveau régime de responsabilité s’appliquera à tous les agents exerçant des fonctions d’ordonnateur ou de comptable, qu’ils soient fonctionnaires, contractuels de droit public ou agents de droit privé (les gestionnaires des organismes de Sécurité sociale). En revanche, il ne concerne pas les ministres ni les élus locaux, à la différence des membres de leurs cabinets et des directeurs d’administration.

Recentrage des infractions 

Sera ainsi passible d’une sanction l’agent qui, “par une faute grave ayant causé un préjudice financier significatif”, aura “enfreint les règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses ou à la gestion des biens” des administrations, ou encore celui qui aura “approuvé” ces décisions “comme tutelle” desdites administrations. Certaines fautes spécifiques sont également visées dans le nouveau régime de responsabilité, comme la gestion de fait ou le défaut de visa du contrôleur budgétaire. 

Quant au caractère “significatif” du préjudice financier, le projet d’ordonnance précise que celui-ci sera “apprécié en tenant compte de son montant au regard du budget de l’entité ou du service relevant de la responsabilité du justiciable”. Pas plus de précisions, d’où l’importance de la jurisprudence future sur cette responsabilité des gestionnaires qui viendra affiner la notion de préjudice “significatif” comme celle de faute “grave”. 

Lors de l’examen de la loi de finances pour 2022, pour rappel, le député Libertés et Territoires – et magistrat de la Cour des comptes de formation – Charles de Courson avait déposé un amendement (finalement rejeté) pour définir ce préjudice comme un préjudice “substantiel, irrémissible et non régularisable” d’une valeur au moins égale à 50 000 euros. “Pourquoi cette somme ? lui avait rétorqué le rapporteur LREM du budget, Laurent Saint-Martin. Il faut garder de la souplesse si l’on veut que cette réforme soit utile, étant entendu que « souplesse » ne signifie pas « laxisme ».” 

Dispositif d’amende gradué

S’agissant des sanctions prévues par le nouveau régime de responsabilité, le projet d’ordonnance acte la mise en place d’un dispositif de sanctions graduées selon les infractions commises. Le juge financier pourra ainsi prononcer des amendes plafonnées à six mois de rémunération ou à un mois en cas d’infraction “formelle” (non-production des comptes dans les conditions fixées par les textes, défaut de visa du contrôleur budgétaire pour engager des dépenses, engagement d’une dépense sans pouvoir ou délégation de pouvoir…).

Individualisées, ces amendes seront “proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l’importance du préjudice causé à l’organisme et à l’éventuelle réitération de pratiques prohibées”, précise le projet d’ordonnance. Une dispense de peine pourra être accordée “lorsqu’il apparaît que le dommage causé est réparé et que le trouble causé par l’infraction a cessé”. 

Par ailleurs, le justiciable “ne sera pas passible de sanctions s’il n’a fait que se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique ou de toute personne habilitée ou s’il peut exciper d’un ordre écrit émanant d’une autorité qui n’est pas justiciable du nouveau régime”, ajoute le gouvernement dans son rapport de présentation du projet d’ordonnance. Outre ces amendes, le gouvernement met également l’accent sur les sanctions managériales qui pourraient être prononcées, comme un non-renouvellement de contrat ou encore la suppression de la part variable de rémunération.

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Club des acteurs publics

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